mardi 2 avril 2013

Shikoku jour 8 : d'hina matsuri à trône marin


Yawatahama. Ville portuaire où j'ai passé la nuit. Hier alors que l'obscurité gagnait rapidement le ciel, Masahito le fan d'Ehime FC m'a conduit à une péninsule près du centre de la ville, où j'espérais pouvoir passer la nuit au terrain de camping indiqué sur la carte. La réalité n'étant qu'un pâle reflet des promesses offertes par cette dernière, aucune installation de camping digne de ce nom nous attendait. L'attrait d'une douche chaude, surtout après la nuit précédente dormie à la dure dans un stationnement, m'a ainsi fait comprendre qu'il valait mieux rester dans la petite auberge appartenant à une amie de Masahito. Le périple en péninsule n'aura toutefois pas été vain, comme en fait foi la photo du superbe coucher de soleil qui coiffe le présent récapitulatif. 
Je sors de l'auberge, avec comme objectif premier de parcourir à pied les quelques centaines de mètres jusqu'à la station, de laquelle rejoindre, par voie ferroviaire, Uwajima, première ville d'importance au sud. Quelques pas suffisent à faire dérailler, figurativement, le projet. Devant, une jeune femme pousse le carrosse dans lequel se trouve son bébé. Sans hésiter elle me dit bonjour et se met à me parler d'hina matsuri. Je sais que matsuri signifie festival, mais c'est la première fois que j'entends l'expression qu'elle emploie. Riko, de son nom, m'y invite, en pointant sa maison, juste en face. Je me méfie, pas tant parce que j'ignore de quoi il s'agit, mais parce qu'un tel empressement n'est pas chose courante. J'accepte tout de même, en l'avertissant que le temps se fait rare pour cause de train à prendre, prétexte à une potentielle retraite rapide.

Nous entrons par la cour avant. La grande pièce à tatami confère à l'intérieur des airs de temple. Riko va signaler ma présence à des gens dans une pièce, au fond. En sortent les Hamamoto, père et fils.

Enfin je comprends à quoi Riko se référait en parlant d'Hina Matsuri. Il ne s'agit pas d'un festival selon l'image de foule en liesse que j'entretiens, mais plutôt de la célébration de la naissance d'une fille, dans leur cas la petite Ryo, prenant la forme de ce que l'on pourrait comparer à une crèche.



De l'explication de l'hina matsuri, notre conservation porte sur une foule de sujets, si bien que les quarante minutes qu'elle doit durer passent en coup de vent. Après quelques photos ensemble, le temps est venu de poursuivre ma route. Je les remercie de m'avoir ouvert leurs portes, nous nous souhaitons bonne continuation, et je me dirige vers la station.


J'atteins Uwajima vers midi trente. Il fait beau et chaud. Je suis heureux d'avoir opté pour t-shirt et shorts ce matin. J'ai d'abord l'intention de marcher jusqu'à la nationale 56 vers le sud, mais en chemin l'imposante colline de laquelle le château étend sa domination sur la ville impose sa volonté, si bien qu'alourdi par mon sac à dos, je la gravis, non sans douleur aux muscles fessiers.


Le jeu en vaut toutefois la bougie. Le château est joli, mais, surtout, les cerisiers et la vue sur la ville sont de toute beauté. Déchiré entre l'envie de m'y détendre et la volonté de progresser sur les routes avant la tombée de la nuit, je décide d'y rester, mais juste un peu.

J'ai voulu photographier le château, mais les cerisiers voulaient toute l'attention

Ayant fait le plein de soleil, de fleurs et de fortifications, je descends la colline et vais me poster en bordure de la route nationale. Monsieur Utsunomiya me fait monter à bord au bout d'une dix-huitaine de minutes. La ville Uwajima doit essentiellement sa réputation aux combats de sumo entre taureaux, sport de spectacle traditionnel, et d'où origine l'ushi-oni (牛鬼, littéralement démon-vache), créature de la mythologie japonaise. Monsieur Utsunomiya est artisan de masques d'ushi-oni, ses pouces à la peau fendue par l'ouvrage en faisant foi.

 Monsieur Utsunomia, maître du démon-vache

Au bout d'une heure, il me dépose devant une station de Sukumo le long de la même route nationale, à vingt kilomètres de mon objectif de la journée, Shimanto. Il est dix-huit heures moins dix, et puisque le prochain train à direction de Shimanto n'arrive que 25 minutes plus tard, je lui indique ma stratégie de faire du pouce en bordure de route jusqu'à l'arrivée du train, et nous nous séparons.

Je lui fais au revoir de la main depuis l'emplacement où je compte faire du pouce tandis qu'il attend, au feu rouge, de tourner en direction inverse, d'où nous sommes venus. J'ai à peine le temps d'établir le contact avec les yeux du premier conducteur que monsieur Utsunomiya, de sa fenêtre abaissée, me crie qu'il m'apportera à destination. Tant qu'à être venu jusqu'ici, autant mieux continuer!, m'explique-t-il après nous être remis en route.

Il décide de rendre visite à un client qui lui avait commandé un masque l'an dernier. La boutique vend notamment des mikoshi, des châsses portables employés lors de processions shintoïstes. Nous nous faisons photographier devant le plus gros et doré des mikoshis qu'il m'ait été donné de voir.








Déposé à Shimanto par ce bon monsieur, je rejoins en train le parc Saga, point final de ma journée. Situé en bord de mer, le grondement des vagues, invisibles dans la nuit, y est omniprésent. Je cherche un endroit à l'abri pour pieuter. La toilette des handicapés est l'heureuse élue. Je fais le pari qu'aucune personne invalide n'aura besoin de l'utiliser avant l'aube, j'en verrouille la porte et y déroule mon matelas de sol.

Pas l'endroit le plus glorieux, j'en conviens, mais assez confortable comme conclusion à une belle journée!



J'apporte toujours de la lecture aux toilettes


Aucun commentaire: