mardi 26 mars 2013

Shikoku jour 2 : de sommeil à sommet

Ohayo gozaimasu! La voix tonitruante de monsieur Hanaï qui me souhaite bonjour me tire brutalement du sommeil. Il vient de tirer le rideau de la boîte du camion, et je devine qu'il est pressé de partir. Mais aurais-je passé tout droit en désactivant mon réveil sans même me réveiller? Je regarde ma montre. Elle indique 3h51, soit plus d'une heure avant le départ convenu! Il m'explique qu'il s'était trompé par rapport à l'horaire des traversiers, et qu'il avait essayé de m'en avertir la veille. Voilà comprise la raison de son appel d'hier, manqué pour cause de cellulaire éteint!

Je fais mes bagages à toute vitesse sous vive pression ressentie, tâche des plus désagréables en étant dans les vapes. En moins de dix minutes, je suis dans la cabine aux côtés de monsieur Hanaï, les dents brossées, à peine mieux réveillé, sachant que je devrai refaire mes bagages, arrivé à Tokushima. Il fait encore nuit, qui ne devient jour qu'après une longue sieste, entamée à la brunante.

Monsieur Hanaï, au pays du soleil levant

Nous atteignons Tokushima vers six heures trente, ce qui laisse amplement le temps à monsieur Hanaï de prendre le traversier de huit heures. Toute la pression qu'il m'a imposée n'aura au final servi qu'à me permettre un départ tôt en matinée.

Je prends un train à même de faire du pouce sur la 438, dans l'objectif vague d'atteindre le mont Tsurugi, deuxième toit de l'île. À la station Nikenya bercée des rayons du soleil, je prends le temps de déjeuner, sous le regard médusé des passagers qui y débarquent aux dix minutes environ.

Beurre de pinottes, délice nourrissant au soleil délecté

Au bout d'un moment, Daisuke et Eri me cueillent. Travaillant pour le compte d'une société d'exploitation forestière, ils doivent aller inspecter un site de coupe, en plein sur le chemin menant au mont Tsurugi.

Nous roulons pendant plus d'une heure en terrain de plus en plus escarpé. Arrivés au site, ils y vont de leur inspection, tandis que je vais explorer les environs. Ma carte indique que Tsurugi est tout près, mais puisque pratiquement aucune voiture ne passe dans cette direction, ils jugent préférable de me déposer à Mami, au nord-est, de retour à la civilisation. Je constate qu'en prenant le train depuis cet endroit, en dix minutes je pourrai tenter à nouveau l'accès à Tsurugi, cette fois par la 439.




Le plaisir d'observer autrui à l'ouvrage, dans ce cas-ci Eri et Daisuke

Le village se nomme Sadamitsu, qui me fait penser à Saddam Hussein. Un habitant de l'endroit, dont les propos ne me sont que partiellement intelligibles, car il a un accent fort et ne tente pas de l'assouplir pour m'aider à comprendre, me conduit jusqu'au pied du mont. La route pour s'y rendre est dans l'état le plus piteux qu'il m'ait été donné de voir au Japon, si bien que je ne me surprends pas de voir le panneau routier à destination, indiquant l'interdiction d'y circuler la nuit jusqu'au 1er avril.

Mis à part les quelques travailleurs qui préparent la remontée pour la saison touristique, l'endroit est désert. Les deux seules auberges sont fermées, et je n'aperçois que quelques randonneurs, qui regagnent leur voiture et partent. Je me résigne à devoir bivouaquer, à l'abri des éléments sous le stationnement de la remontée. Puisqu'il n'est pas encore seize heures, je décide entretemps de faire moi aussi un peu de randonnée.

Le sentier menant au sommet de Tsurugi me mène d'abord à un temple, lequel est flanquée d'une auberge, exploitée par le prêtre et sa femme. La porte d'entrée n'est pas verrouillée, j'entre et je discute avec eux du prix d'une chambre pour la nuit. Puisqu'il est un peu élevé, je leur indique je vais y penser pendant les quelques heures à me balader.

Je pars sans espoir d'atteindre le sommet, car les deux heures d'ascension et la neige abondante, aux dires d'une famille rencontrée plus tôt, ne me permettraient pas un retour avant l'obscurité. La montée se déroule toutefois bien, et un déclic se produit vingt minutes plus tard en rencontrant deux Suédoises qui redescendent. Plustôt que deux heures de montée avec de la neige à mi-mollet, elles parlent plutôt d'une heure et demie (avec nombreuses pauses) et d'un peu de neige par endroits, jusqu'à la cheville.

Redoublant d'ardeur, je me lance. Ce sera le sommet, coûte que coûte. Il y a bien quelques endroits encore recouvert d'une neige sale, mais pas de quoi s'inquiéter. J'atteins mon objectif peu avant 17 heures, ce qui fait en sorte qu'à l'exception de quelques chevreuils, vite enfuis, j'ai le sommet à moi seul.



L'ascension de ce mont n'était pas au programme, mais un voyage teinté de souplesse comme le mien permet pareilles surprises. Et comme préparation à l'ascension plus ardue d'Ishizuchi, la plus haute montagne de Shikoku, difficile d'espérer mieux. 

J'amorce la descente de retour au pied de la montage, décidé de rester à l'auberge ce soir, pour me récompenser de cette deuxième palpitante journée de voyage. Que les jours à venir me réservent d'autres belles surprises!




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