lundi 9 avril 2012

Course-métrage

D'une certaine manière, courir c'est voir un documentaire sur la réalité de sa ville où l'unique narration est sa respiration. Dans la majorité des visionnements, on n'interagit pas avec le paysage, on le subit, mais à l'occasion le long-métrage se transforme en livre dont vous êtes le héros ou du moins un personnage mineur.

C'est ainsi que j'ai couru aujourd'hui, par un temps à tendance estivale.

En pur observateur, je traverse un parc au sein duquel des retraités se prélasse à l'ombre de cerisiers tout en fleurs. Je m'engage ensuite dans une rue, où je croise une dame au vélo bien chargé de provisions. Je ne fais pas cinq pas que je l'entends chuter lourdement dernièrement moi. De simple figurant, je deviens protagoniste. L'acteur de série B est prêt à faire sa B.A.

La pauvre dame a éparpillé son manger, sur le trottoir et un peu dans la rue. Je l'aide à ramasser ses crevettes, son thé, sa sauce soya, ses nouilles. Ne manquent que quelques œufs rompus, arrangés avec le gars des vues. En bonne Japonaise, elle ne cesse de s'excuser, comme si sa chute m'était inconvenante, comme si l'aider était un affront au bon goût et à la dignité.

Bien que visiblement trop chargée, elle refuse catégoriquement mon offre d'amener ses vivres jusqu'où elle vit, selon ses dires tout près. Tant pis. 気をつけて。危ないよ!, que je lui dis. J'y vais d'un haussement d'épaules, puis je reprends ma route. Honnêtement, je ne pense pas avoir haussé les épaules, mais faut bien conférer une touche dramatique. Il s'agit d'un documentaire fascinant, après tout.

Relégué à nouveau à un rôle sans dialogue, donc, je poursuis mon chemin. Un héros aurait su l'empêcher de tomber. N'importe qui d'autre aurait apporté son aide après coup. Un livre dont vous êtes n'importe qui.

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