Quelques vingt minutes plus tard, un phénome unique à la région mais fréquent se produit : le volcan s'offre une petite éruption matinale, et bien vite l'habituel filet de cendre cède la place à un impressionnant panache. Je demande à Johnny de m'immortaliser, à mi-saut, pourquoi pas.
J'aimerais bien me remettre à peinturer, mais hier nous sommes venus à bout de la peinture ivoire. Le patriarche de la famille est bien allé acheter un nouveau pot, mais il s'est trompé en optant pour de la peinture de couleur blanche.
Je suis donc condamné à attendre qu'on m'apporte la couleur adéquate pendant quelques heures, lesquelles sont consacrées à la lecture d'un bon bouquin, et aux retrouvailles plaisantes avec une habituée du café, rencontrée l'année dernière.
Je me remets à l'ouvrage en début d'après-midi, non sans entretemps m'être offert une balade en patins à roulettes, question de rendre homage aux grands de Canadien, lequel amorcera sa vraie saison sous peu.
En guise d'appui à nos Glorieux et à leur flambeau, hommage à deux grands qui de leurs bras meurtris ont su le porter bien haut, d'abord en simulant le faciès victorieux de Casseau, puis, plus subtilement, en portant des patins à roulettes des années 1970 et un t-shirt dont la couleur n'est pas sans rappeler le Démon Blond.
La Golden Week est constituée d'une séries de jours fériés qui se succèdent au tournant des mois d'avril et mai, généralement dans la même semaine. Cette année, toutefois, elle se répartit plutôt sur deux semaines. Décidées sans trop y penser il y a environ trois mois, les dates de mon séjour à Kagoshima, du lundi 29 avril au vendredi 3 mai, ne sont donc pas idéales, car seuls lundi et vendredi sont fériés, les autres étant des jours de semaine ordinaires. Il y a bien quelques personnes qui font le pont, mais ce n'est pas si courant. Je ne serai donc sur place que pour la première journée du week-end de quatre jours qui en représente l'apogée.
Sans demande explicite en ce sens de la famille qui m'accueille, je prends conscience de l'objectif d'achever la préparation de leur nouveau point de vente, le Little Mommy, à temps pour ce vendredi férié, qui s'annonce occupé. Il me reste donc les murs intérieurs à finir de peindre, et l'enseigne extérieure, devant indiquer Little Mommy, car annexe du Mommy's café. Je comprends dans le même élan qu'il ne me reste pas beaucoup de temps.
Ainsi doté d'une mission clairement définie, ce mercredi amorcé tard, puis jeudi, au travail possible dès la matinée, je suis beaucoup plus concentré. La peinture intérieure, avec contour de fenêtre pour en rehausser l'apparence, est terminée en milieu d'après-midi, jeudi. Commence le véritable défi : le lettrage de leur devanture. Si Chiyomi (la « Mommy ») ne se préoccupe aucunement de la forme et de la qualité de ce dernier, je ne peux me permettre pareil état d'esprit, étant à la fois malhabile de mes mains et perfectionniste un brin.
Châssis rougi
Je songe à la manière de procéder. Il y a une grande tablette de papier de bricolage. Je calcule que le lettrage prendrait sept de ces feuilles, soit trois pour Little, trois autres pour Mommy, et une feuille pour l'espace les séparant.
Me vient ensuite l'idée de m'inspirer de polices de caractères. Sur mon ordinateur, j'en choisis cinq qui me plaisant, que je présente à Chiyomi. Nous convenons que celle intitulée Bernard MT Condensed est préférable.
Armé d'un stylo, d'une règle et d'un exacto, je me mets à l'ouvrage. Son accomplissement exige un travail minutieux, si bien que bien vite je ferme la porte et les fenêtres du conteneur qui me sert de bureau, question de minimiser les distractions.
Les dix-huit heures sont déjà bien entamées lorsque j'en arrive à bout. L'heure avancée me fait toutefois comprendre qu'il serait plus sage de remettre au lendemain matin l'application de la peinture grâce à ce pochoir.
À la fois satisfait du résultat, façonné de mes mains maladroites, et fatigué par l'effort de la journée, c'est avec plaisir que je me joins au barbecue que l'on a organisé, à l'occasion de ma dernière soirée. Merci mes amis, nous sommes presque fin prêts pour demain!
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