Je freine ma course, m'approche de l'étal, et tombe sous le charme d'une boîte de métal ayant jadis contenu 20 cigarillos que je devine petits car dénommés Lilliput, et ornée d'un bouffon nous réservant un clin d’œil espiègle. Et puisque la fumée de ce produit tue en finnois (tupakointi on hengenvaarallista) et peut tuer en suédois (Rökning kan döda), je décide de faire mienne cette merveille à cent yens. La boutique vient de ferrer un poisson, lequel monte au 3e étage où elle se trouve pour régler la note et peut-être se laisser tenter par d'autres appâts.
J'en fais le tour. L'endroit regorge de petits trésors, mais aucun ne provoque le même impact que la boîte-hameçon. Il y a aussi que je dois revenir chez moi à la course, ce qui diminue l'attrait des objets plus volumineux. Font partie de cette catégorie des boîtes de rangement du début du vingtième siècle aux jolies décorations, pour lesquelles je me promets de revenir.
Comme dernier effort de découverte de trouvaille, je m'intéresse aux banderoles triangulaires, accrochées les unes devant les autres sur le mur, tout au fond. Une d'entre elles me plaît particulièrement, tant pour ses belles couleurs que pour le paysage qu'elle dépeint. Je me la procure, sans savoir de quelle montagne il s'agit.
Quelques jours plus tard, tout se rejoint. Des suites de ma décision de voyager à Shikoku, je me mets à en chercher le point culminant, dont la conquête constituera un objectif difficilement contournable. La montagne en question est dénommée Ishizushi, littéralement marteau de pierre, et la photo qui en accompagne l'article sur wikipedia m'est immédiatement familière. Je porte mon regard sur la banderole et l'impression s'avère : cet objet acheté pour ses qualités esthétiques devient par la force du hasard la représentation d'une montagne que je compte gravir pendant mes vacances à venir. Jolie coïncidence!
D'arlequin narquois à banderole divinatrice,
pour une fois poisson et pêcheur y trouvent leur compte
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