Départ pour
notre troisième et dernière destination du voyage : après l’ensemble
Panglao-Bohol aux infrastructures touristiques assez développées, suivi de
Camiguin plus tranquille et charmante, direction Cagayan de Oro, chef-lieu de
la province de Misamis Oriental, province du nord de l’île de Mindanao, la
deuxième plus vaste du pays.
Le
traversier qui doit nous permettre de gagner cette nouvelle île n’est pas
annulé, tel que nous le redoutions, et nous y prenons place quelques vingt
minutes avant le départ prévu, le matin à huit heures. Peu après le départ nous
avons droit au spectacle du premier Philippin fâché aperçu du voyage :
debout à une dizaine de rangées de sièges devant, gros et joufflu il semble en
colère à l’égard d’un autre passager, et exprime sa frustration assez
vocalement. Heureusement, il se calme avant que l’affaire ne s’envenime
davantage (quoiqu’un côté voyeur en moi ait voulu le voir en venir aux poings).
Nous
accostons à Balingoan au bout d’une heure trente. Cette petite localité est
située à près de quatre-vingt-dix kilomètres de Cagaya de Oro, et dès la porte
du terminal franchie un type aux deux incisives inférieures rongées vient nous
proposer le transport privé jusqu’au centre de la ville. À 2 000 pesos, nous
jugeons son prix exorbitant, mais celui-ci nous indique qu’à 800 pesos, il peut
nous transporter, pourvu qu’il trouve d’autres personnes à transporter.
Sans
accepter ni refuser son offre, car je doute qu’il puisse nous trouver de tels
compagnons de transport, nous cherchons ailleurs. Un autre type nous offre de
nous emmener jusqu’au terminal de bus de Balinguan pour dix pesos chaque
(environ 50 cents au total). Nous convenons, présentons de brèves excuses à
celui aux incisives abîmées, et montons dans le tricycle de son compatriotes.
Celui-ci avance de cinquante mètre, tourne à droite dans la route principale,
la parcourt sur un autre cinquante mètres, et voilà pour le parcours de taxi le
plus court de ma vie!
L’homme
enrichi de vingt pesos nous dépose directement devant un vieil autocar presque
déjà rempli de Philippins. Le prix de transport jusqu’au centreville de
Cagayan : soixante pesos chaque! Pareille aubaine est évidemment dégarnie
de tout confort, et l’habitacle est tout autant sinon plus inconfortable que
les bus scolaires de mon enfance. L’autocar semble rempli à capacité au moment
du départ, mais cela est sans compter l’esprit d’entreprise philippin, car à
maintes reprises il s’immobilise en bord de route pour laisser monter de
nouveaux clients, qui s’entasse d’abord à l’arrière, puis un peu partout, à
trois sur les banquettes conçues pour deux, et finalement les gens doit se
tenir debout dans l’allée. Sans surprise notre banquette finit par être occupée
par une grand-mère tenant son petit-fils sur les cuisses.
Nous sommes
entassés, la route est longue, il fait chaud, et malgré tout le transport se
déroule somme toute bien. Guillaume a le temps de finir de lire son roman,
tandis que je parviens à faire la sieste.
À mi-chemin
environ, nous sommes témoin d’un autre événement qui, à la manière de l’homme
furax du traversier, se produit probablement souvent aux Philippines, mais pour
lequel nous assistons pour la première fois : alors que nous sommes
immobilisés dans un tronçon passant, tout juste à notre hauteur nous voyons le
conducteur d’une moto tentant un dépassement à notre gauche (du côté où nous
prenons place) fait une mauvaise manœuvre et glisser longuement, agrippé à sa
moto et en compagnie de ses deux passagers, sur l’asphalte de la voie opposée.
Un camion-citerne a tout juste le temps de se ranger, sans quoi ces trois
accidentés de la route y auraient laissés leur peau, plutôt que de ne perdre
qu’un peu de peau par frottement.
C’est la
commotion autant dans l’autocar que pour les Philippins témoins de l’accident
dans la rue. On vient rapidement en aide à ces trois personnes, on enlève la
moto de la route, et rapidement la circulation reprend son cours normal et
dense, au moment où notre propre bus se remet en route. Les personnes
impliquées ne semblent pas blessées, au point où, quelques minutes plus tard à
peine, nous les apercevons qui nous dépassent, l’un des passagers tenant un
bout de clignotant de la moto, détaché sous la force de l’impact!
Nous
parvenons finalement au centre de Cagayan, et allons prendre une chambre à
l’hôtel Ramon, plutôt délabré mais bien situé, comme premier pied à terre dans
ces nouvelles terres à explorer. La soirée dans cette ville chaotique,
congestionnée mais bien vivante, nous offrira notre troisième situation
inusitée du voyage, sous la forme d’une fille avilie par l’alcool et
embarrassant ses amis, en plus d’autres rebondissements et surprises. Camiguin
la paisible est bien loin, mais la folie d’un centre urbain philippin mérite
aussi d’être vécue, ainsi pensons-nous au moment de trinquer dans le resto-bar,
alors que derrière nous une certaine fille ivre fait toute une scène.
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